Encore une fois, lors des événements en Iran, le nom de Twitter est apparu sur le devant de la scène médiatique. Cette société américaine a développé un outil de communication plébiscité par des millions d’adeptes. Il s’agit d’un service, gratuit, qui permet aux internautes de poster en ligne des minimessages (de 140 caractères maximum), informant leurs contacts (followers), de ce qu’ils sont en train de faire, renvoyant à des pages Web, des vidéos, etc. Extrêmement réactif, l’outil peut être utilisé comme une messagerie instantanée et un blog.
Biz Stone, 35 ans, un des cofondateurs de Twitter, était au Festival de la publicité à Cannes, lundi 22 juin, pour nouer des liens avec les publicitaires et les grandes marques. Car Twitter, fort de son succès d’audience et de sa médiatisation, cherche encore son modèle économique.
Comment est né Twitter ?
En 2006, nous avons été inspirés par l’idée de la messagerie instantanée. Chaque membre indique s’il est en ligne ou non, s’il souhaite communiquer ou pas. Avec Jack Dorsey, cofondateur de Twitter, nous nous sommes dit qu’il serait intéressant de savoir ce que chacun fait à tout moment et qu’il serait bien de créer un service de messagerie accessible très facilement, depuis son téléphone mobile, par exemple, sans être obligé d’être derrière son PC. Jack et moi, nous avions déjà dix ans d’expérience dans les blogs et les réseaux sociaux. Twitter est né de cette réflexion, mais ce sont les gens qui ont transformé l’outil par l’usage.
Twitter reste un service gratuit, générera-t-il un jour un chiffre d’affaires conséquent ?
Nous ne pouvons pas parler de recettes en 2009. C’est une année d’expérimentation de notre modèle économique. Il s’agit moins de développer un modèle publicitaire que de nouer des liens avec les grandes marques et de voir les services dont elles ont besoin.
Nous avons constaté que de nombreuses marques utilisent Twitter pour interagir avec leurs clients. Des sociétés comme Jetblue, Comcast, Dell ou Whole Foods tirent avantage de Twitter. Pour l’instant, elles créent des comptes gratuits. Nous voulons tester les usages commerciaux de Twitter sans nous aliéner les followers (membres). Nous pouvons créer des comptes commerciaux payants avec des fonctions améliorées et proposer aux entreprises des outils de mesures et des statistiques. Mais le service Twitter continuera à être gratuit.
Avez-vous refusé une offre de rachat de Facebook qui valorisait Twitter 500 millions de dollars (354 millions d’euros) et pourquoi ?
Nous n’étions pas été intéressés par cette offre. La société avait à peine deux ans. Nous voulons montrer que nous pouvons nous développer et gagner. Nous ne sommes encore qu’à 1 % ou 2 % de notre aventure. L’entreprise, qui est installée dans un loft à San Francisco, a franchi la barre des 50 employés. Nous sommes bien financés pour l’instant. Nous évaluerons nos besoins de financement en fonction des résultats de nos tests commerciaux.
Quelles sont vos relations avec Facebook, Google et les médias traditionnels ?
Avec Facebook, nous avons des zones de recouvrement, mais nous sommes de plus en plus complémentaires. Beaucoup de gens utilisent à la fois Facebook et Twitter. Twitter n’est pas un réseau social, mais un réseau de communication qui tisse des relations sociales.
Nous ne concurrençons pas Google. Nous ne proposons pas un moteur de recherche qui couvre l’Internet, mais seulement Twitter. Nous restons focalisés sur la création, le partage et la recherche des tweets (messages). Nous n’allons pas nous lancer dans l’hébergement de vidéos. Nous continuons à privilégier une plate-forme ouverte qui favorise le développement d’un écosystème autour de Twitter. En ce qui concerne les médias traditionnels, nous sommes complémentaires. Il est vrai que lors de certains événements, nous avons devancé les agences de presse. Nous sommes très bons pour les breaking news (informations urgentes). Mais nous n’avons ni la mise en perspective ni l’analyse journaliste.
Lors des récents événements en Iran, quel rôle a joué Twitter et est-il exact que le gouvernement américain vous a demandé de décaler une opération de maintenance qui risquait d’interrompre votre service ?
Lors des événements en Iran, la chose importante à retenir est le rôle crucial que joue une plate-forme ouverte d’échange d’information. Il ne s’agit pas uniquement de Twitter. Cela aide les gens à partager ce qu’ils savent, à raconter ce qui est en train de se passer.
Concernant l’opération de maintenance, nous l’avions décalée plusieurs fois. Nous avions convenu avec notre partenaire NTT America, que ce serait le 19 juin. Nous avons immédiatement eu des réactions des membres de Twitter nous disant que nous ne pouvions pas faire cela à cause des événements en Iran. Nous avons reçu une demande du gouvernement américain, mais en aucun cas un ordre ou une injonction. Cela prouve que le gouvernement reconnaît la valeur de l’outil. Mais c’est nous qui avons pris la décision de retarder de quelques heures l’opération de maintenance et d’en réduire la durée.
—|
Juillet 2006 : date de création de la plate-forme et de lancement du service. La société proprement dite a été créée en avril 2007.
Nombre de salariés : 50.
Siège : San Francisco (Californie)
Fréquentation : en mai 2009, selon le cabinet Nielsen, Twitter comptait 18 millions de visiteurs.